Trouver en soi la petite lumière

Il y a des rencontres qui changent le cours d’une vie, qui arrêtent ce qu’il y a eu avant, dans l’instant, et tout se trouve chamboulé, redistribué. Il y a des livres qui ont cette puissance-là, ils viennent jusqu’à vous comme si de rien n’était et là, sans aucun préavis, ils vous cambriolent, ils vous déshabillent et vous disent « et maintenant, on fait quoi? ».
« La petite lumière » d’Antonio Moresco, poète contemporain italien a ce talent, il dit sans que les mots ne soient abîmés ou encombrés, une vérité simple et universelle « Regarde, toi aussi tu es blessé comme moi. » Son texte, « petite météorite testamentaire secrète et intime », s’est imposé à lui, la rencontre avec l’enfant qu’il a été. Prendre ce chemin, traverser les ombres menaçantes des traumatismes encore incandescents, descendre jusque-là, sur un fil et la peur au cœur, pour entendre les prières d’un enfant non armé pour cette vie.
« C’est quoi ce monde? », je pensais en regardant les enfants qui s’en allaient tout seuls dans le noir, avec leurs petites jambes nues sous leur petite blouse et avec leur cartable. « Où est-ce que, quand tout le monde dort, il y a des enfants morts qui sortent en silence des écoles du soir, tout seuls, sans que personne ne le sache, sans que personne ne les voie. Ils n’ont personne qui les attend, debout devant le portail, ils ne lèvent même pas leur regard dans le noir, de toute façon ils savent pertinemment que personne ne les attend. »
Se sentir oublié dans l’enfance, fait de nous des mendiants.
« La petite lumière sera comme une luciole pour les lecteurs qui voient encore que la littérature est une entreprise dont la portée se mesure dans ses effets sur l’existence. »
Alexandra Legendri-Fauron
1 septembre 2019.